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Extrait :
(...)
L’histoire peut commencer. Un homme assis dans un potager sur une chaise en bois attend la lune qui s’est enlisée dans un épais nuage formant bien entendu un dragon d’une telle beauté que toutes choses terrestres semblent se courber de respect. Puis la lune est pondue par la bête qui bondit plus haut ou plus loin ou plus bas, personne ne le sait, pas même le bonhomme assis qui voit enfin ses tiges d’asperge comme il voulait les voir, et fait un vœu. Je ferai commerce de mes ongles lunule par lunule, à raison de dix lunules par mois. Ce que d’aucuns appellent rognures, je les nomme lunules ou croissants. Chaque croissant d’ongle sera fiché dans une galerie de ver, de telle planche ancienne d’un escalier ou d’un meuble à tiroirs, planche peinte en noir ou en vert sombre comme un calendrier, offrande au temps d’un croissant de lune. Tout y sera dit.
Est assise dans son jardin, à l’ombre du noyer, celle qui naquit à Staraya Buda à sept cents kilomètres à l’ouest de Moscou, au milieu de la vaste plaine formée de croupes de tourbe, et ses orteils nus jouent avec une feuille morte prématurément, et ses yeux sont fichés dans le bleu dense du ciel hesbignon. À ses pieds le chien Berek dort dans l’aspérule odorante. S’agitent les cheveux de celle qui aimait s’asseoir sur l’unique rocher erratique du village, qui, à l’heure présente, s’enfonce dans la terre grise de forêt. Là, ce n’est pas le tchernoziom, petit père. Là, quand advient la famine, on mange des nèfles blettes et des cornouilles. Sa maison était la plus belle, les boiseries des fenêtres délicatement festonnées d’arabesques et peintes en bleu, en vert et en rouge, afin de rappeler le firmament, la viridité végétale et le feu de beauté du soleil. Derrière les rideaux, les yeux de Timofievna. Regarde les peupliers de Hesbaye, celle qui était joyeuse et qui chantait dans l’air parfumé de la pro- vince de Smolensk en compagnie des autres enfants dont il faudra chercher les traces. Là, la foudre tombe avec force, tuant humains et bestiaux.
(...)
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Extrait :
à Patrick
Poème du comté de Cork
clash of the ash, le grand sport aux poumons des
cornemuses dans l'air et sur l'herbe s'ébattent
des jeunes filles en chair, clash of the ash, le
chien a sauvé la pierre des vagues fougueuses de
la masse océanique féminine, la belle pierre, le
beau schiste, clash of the ash, les fesses tendues
à craquer, les seins souples, la bouche, les yeux
et de la vulve l'écume, grande brasserie du peuple
des pierres en cercles, clash of the ash, hourvari
semant des genêts dans les plates-bandes des morts
et des vivants, et, des frênes, résonne le frêne du
manche de la hache
***
Toutes larmes confondues
toute morale morfondue
toute conque foutue
toute morve bue
toute lime moulue
toute mort tue
en catalepsie demain
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Eugène Savitzkaya en 1978. Photographie : Sophie Bassouls
Bon : Essayer de se frayer un chemin dans les ronces de cette sorte de compost poésie...